Rubrique pratique : Comment...survivre en Vélib, et pourquoi le choisir quand même quand on est une femme ?

Cela semble stupide. Cela fait peut-être même doucement rigoler nos ignares lecteurs simplement pédestres ou bêtement véhiculés. Mais les utilisateurs, et surtout trices du Vélib se marrent moins : ils, et surtout elles, savent que ce n'est pas si facile de survivre en Vélib.

Et pour cause : avant tout, et quelle que soit l'heure (tête dans le cul du matin, ou bourrée du soir) il faut choisir le bon Vélib. Il faut donc savoir éviter les pièges (nombreux) : dédaigner le vélo dégonflé, celui qui n'a plus de chaîne, celui à la selle qui descend, celui avec un sachet blanc (attention au dealer déguisé en vélib quand même), celui qui fait clac-clac à chaque tour de pédale, et celui sans pédales (du vécu, promis) (La rédaction est ouverte à toutes les expériences d'utilisatrices, sauf chats crevés coincés dans les roues : trop macabre pour notre joyeuse rubriquel).

La suite des épreuves : coups de klaxon agrémentés d'insultes en tous genres (de c...asse à grosse p...te sans parler de v...ne et m..äkrw...re, selon l'origine ethnique du vulgaire conducteur), transpiration abondante après avoir fait la course avec un scooter pressé (sans qu'il en ait conscience, en réalité,le plus souvent), et pire, fin du brushing savamment et longuement travaillé le matin : le Vélib est un sport pour les femmes fortes et courageuses - sans parler de la patience, qualité indispensable quand il s'agit d'attendre pendant vingt minutes une place pour déposer le destrier, alors qu'on est déjà forcément en retard au boulot à cause de tous ces cons motorisés qui nous ont à plusieurs reprises coupé la route.

D'ailleurs : est-ce jalousie liée à la rapidité des dites cyclistes ? (Rappelons qu'à Paris, se déplacer en vélo crée un vrai gain de temps par rapport au même trajet en véhicule, n'en déplaise à tous les fans d'embouteillages, et que je nique n'importe quelle voiture entre la Sorbonne et Beaubourg, parole). Est-ce jalousie liée à leur corps de rêve, dont le galbe, objet de tous les regards concupiscents au bureau, se justifie essentiellement par leurs efforts pédalistiques, notamment quand il s'agit de doubler un bus par la droite sans décéder dans son angle mort ? Est-ce jalousie liée à leur indépendance d'esprit et à leur rébellion, quand elles grillent les feux rouges avec un aplomb qui fait même douter de leurs yeux assermentés les agents de l'ordre public? Quelles qu'en soient les raisons : les autres utilisateurs de la voie macadamisée nous détestent.

Conclusion : l'utilisation du Vélib requiert intelligence, persévérance, esprit de contradiction et résistance à l'oppression (plus, parfois, un masque à oxygène) : ne sont-ce pas là toutes qualités féminines ? Et puis, faire du Vélib, c'est avoir un CV de serial killer, et un corps d'enfer à moindre coût (24 euros par an, on aurait tort de s'en priver).

On en est à se demander, ex-Mesdemoiselles et Mesdames, vous jeunes innocentes qui croyez être trop rondes de 0,37 kilos, vous jeunes mamans qui venez d'accoucher et n'avez pas tout perdu voire rien (sauf quelques grognasses, éliminées d'emblée pour mauvais esprit), vous jeunes ménopausées qui vous regardez trop dans le miroir, pourquoi vous prenez encore la voiture.

P.S : Deux aimables personnes en bleu m'ont dernièrement rappelé qu'il n'était pas judicieux, voire qu'il était prohibé, je cite, « de téléphoner en conduisant son Vélib ». Je me permets de vous transmettre cette information, qui, j'en suis consciente, peut en décourager plus d'une que mon sévère, mais juste, article n'aurait pas suffi à démotiver...